par L'ATELIER JURIDIQUE | 22 Mar, 2020 | Actualités
Les principales mesures en droit du travail :
Le gouvernement est donc habilité ce jour à légiférer par ordonnances afin de modifier des dispositions notamment concernant vos congés payés, la prime de pouvoir d’achat et les consultations du CSE.
Cette même loi instaure l’urgence sanitaire pour deux mois.
Les congés payés / RTT / Jours de repos / CET
Après une première proposition laissant entendre que l’employeur pourrait décider de manière unilatérale de la prise de congés payés durant la période de confinement, un amendement du gouvernement, impose après quelques discussions avec les partenaires sociaux (notamment la CFDT) à l’employeur de négocier un accord collectif (d’entreprise ou à défaut, de branche), afin de pouvoir déroger aux délais de prévenance (1 mois actuellement) lui permettant de contraindre les salariés de poser jusqu’à 6 jours ouvrables de congés payés.
Comprenez donc ici que cette possibilité donnée à votre employeur de vous imposer de prendre jusqu’à 6 jours de congés est subordonnée à ce qu’un accord soit trouvé:
- Soit entre les organisations syndicales représentatives (OSR) de votre entreprise et l’employeur;
- A défaut de délégués syndicaux, entre un élu du CSE mandaté par une OSR et l’employeur, avec adoption de l’accord par un référendum aux 2/3 des salariés de l’entreprise,
- En l’absence de mandat donné par une OSR, un élu du CSE non mandaté et l’employeur avec ratification dudit accord par l’ensemble des membres du CSE.
Même si l’on ne peut que saluer la volonté du gouvernement de favoriser le dialogue social en entreprise malgré un contexte des plus délicats, on s’étonnera volontiers d’une telle exigence de négociation collective. Présentement, les conditions de travail et d’exercice des mandats sociaux se portent peu à de telles négociations. Ces dernières risquent malheureusement d’avoir pour effet de ralentir les prises de décisions, ou de tendre les relations sociales avec les collaborateurs.
Vos RTT, JRTT et jours de repos affectés sur votre CET pourront vous être imposés
S’agissant cependant des RTT et jours de repos des conventions de forfait ainsi que les jours affectés sur le compte épargne temps (CET), l’employeur pourra les modifier de manière unilatérale, vous n’aurez donc pas le choix.
Cas particulier : Les entreprises « particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation ou à la continuité de la vie économique et sociale » pourront de fait, déroger aux règles d’ordre public et aux conventions pour la durée du travail (et donc déroger aux 35h hebdomadaires), le repos hebdomadaire et le repos dominical.
Le CSE
Le CSE devant, à l’origine, être informé préalablement à une consultation sur l’organisation du travail dans l’entreprise (et donc en cas de mise en place du chômage partiel), une ordonnance viendra modifier les modalités de sa consultation afin qu’il puisse rendre des avis dans des délais aménagés face à la situation d’urgence sanitaire.
Des dispositifs tels que la visioconférence seront favorisés.
Concernant les élections professionnelles en cours, cette ordonnance comprendra également une disposition permettant de reporter les élections des CSE qui étaient prévues pendant la période de confinement (l’amendement).
Le chômage partiel
Cette activité partielle pourra concerner « toutes les entreprises quelle que soit leur taille », même les entreprises du BTP qui faisaient jusqu’à présent l’objet de grands débats (l’amendement).
En effet, cet amendement a pour objet de pallier les difficultés éprouvées par les entreprises de certains secteurs (notamment du bâtiment) à faire reconnaître leur éligibilité à ce dispositif et dans leurs relations avec les DIRECCTE. Il apporte ainsi une clarification nécessaire et précise que le dispositif de chômage partiel concerne bien toutes les entreprises.
Est encore à l’étude la problématique d’élargir le nombre des bénéficiaires (notamment les indépendants), de réduire pour les salariés le reste à charge pour l’employeur et de favoriser la formation à l’occasion des périodes d’inactivité.
La prime de pouvoir d’achat
Il est désormais prévu la possibilité d’assouplir par ordonnance les modalités d’octroi liées à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat. Il serait possible de la verser sans avoir d’accord d’intéressement.
De même, la date d’échéance de versement de cette prime, actuellement fixée au 30 juin 2020, sera sans aucun doute repoussée.
par L'ATELIER JURIDIQUE | 4 Mar, 2020 | Actualités
Psychose ou crainte légitime, l’évolution du Coronavirus ou Covid-19 inquiète plus que jamais les salariés des entreprises.
Vous redoutez sans doute les risques de contaminations liés aux contacts avec des personnes pouvant être contaminées dans le cadre de l’exercice de votre travail, sachez exercer conformément votre droit de retrait.
L’obligation de sécurité de l’employeur
Elle est bien connue et pourtant encore souvent mise à mal, l’obligation de sécurité des travailleurs incombe à votre employeur comme en dispose l’article L.4121-1du code du travail. Ce dernier se doit de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer votre sécurité et protéger votre santé physique et mentale.
Cette obligation est enrichie de l’article L.4132-5 du même code, prévoyant que votre employeur doit prendre les mesures et donner les instructions nécessaires pour vous permettre en cas de danger grave et imminent, d’arrêter votre activité et de vous mettre en sécurité en quittant immédiatement votre lieu de travail.
Mais attention aux procédures.
L’exercice du droit de retrait en entreprise
L’article L.4131-1 du code du travail vous permet dans un cadre précis d’exercer ce droit. En effet, il vous est possible d’alerter immédiatement votre employeur d’une situation de travail dont vous avez un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger « grave » et « imminent » pour votre vie ou votre santé, ou si vous constater la moindre défectuosité dans les systèmes de protection devant être mis en place dans votre entreprise.
Attention cependant à bien interpréter les caractères « grave » et « imminent » du danger, cela portant bien trop souvent à interprétation erronnée.
Le danger « grave » correspond à « tout danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée ».
Le danger « imminent » est celui « susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché ».
Ce n’est qu’une fois cette information faite à votre employeur et après vous être assuré de la légitimité de l’exercice de ce droit que vous pourrez vous retirer.
Une procédure stricte qui n’est pas sans risque
Bien souvent en entreprise, des salariés se sentent légitimes à mettre en œuvre ce droit de retrait car ils s’estiment « exposés » à un risque.
Mais attention, vous devez :
- D’une part vous assurer que le danger est d’une gravité telle qu’il pourrait entrainer de manière brutale votre décès ou une incapacité permanente ou temporaire prolongée,
- D’autre part que votre employeur n’a pas mis en œuvre des mesures de protection pour remédier à ce danger.
Il a d’ailleurs déjà été reconnu très récemment qu’un salarié quittant prématurément son poste de travail sans en avertir son employeur et sans remplir exactement les conditions susmentionnées était en situation d’abandon de poste.
(CA de Metz, Chambre sociale, 24 Février 2020 – n° 17/03315)
Un usage légitime du droit de retrait assurant votre protection…
Si vous exercez conformément votre droit de retrait, votre employeur sera dans l’impossibilité de vous imposer la reprise de votre activité si le danger grave et imminent invoqué persiste.
De surcroit, comme en dispose l’article L.4131-3 du code du travail, votre employeur ne pourra vous pénaliser d’aucune sanction ni retenue sur salaire dès lors que vous aviez un motif raisonnable de penser qu’il présentait un danger grave et imminent pour votre vie ou votre santé.
…Mais pouvant entrainer des sanctions si exercer abusivement
Toutefois attention, si les conditions décrites ci-dessus ne sont pas réunies, votre employeur pourra, face à votre abandon de poste, procéder à une retenue sur salaire quand bien même vous demeureriez à sa disposition.
(Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 Novembre 2008 – n° 07-87.650)
Il a également récemment été jugé que le licenciement d’un salarié refusant avec persistance de reprendre son travail alors que son droit de retrait n’était plus justifié, était légitime.
(CA, Besançon, Chambre sociale, 7 Mai 2019 – n° 18/00313)
Ce droit de retrait peut-il être mis en oeuvre lorsque l’un de vos collègues revient d’une zone à risque ou a été en contact avec une personne contaminée ?
Le ministère du travail précise que les conditions d’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, sous réserve de l’appréciation souveraine des juges, si votre employeur a mis en œuvre les recommandations gouvernementales qui sont chaque jour actualisées sur cette page: https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus
En effet, ces recommandations suivies, le risque pour les salariés de l’entreprise serait limité car seul un contact prolongé et rapproché avec des personnes infectées pourrait être facteur de contamination.
Kate SOLIMAN