par L'ATELIER JURIDIQUE | 24 Juil, 2020 | Actualités
Les hauts magistrats admettent que le délai préfix entre une information et une consultation du CSE puisse être prolongé (ou aménagé) « d’un commun accord » (même implicite en l’espèce) entre l’employeur et le CSE, sans qu’un vote en ce sens ne soit spécifiquement intervenu au cours d’une réunion.
Attention cependant, je le répète toujours aux élus: le Code du travail ne prévoit une telle possibilité qu’en cas (Article L. 2312-16):
– d’accord collectif si délégué syndical il y a;
– ou d’un accord adopté à la majorité des élus titulaires du CSE.
En principe, la procédure « d’information en vue d’une consultation » est enserrée dans un délai règlementaire variant de 1 à 3 mois (article R. 2312-6 du code du travail), à l’issue duquel le CSE qui ne s’est pas exprimé est réputé avoir rendu un avis négatif.
L’employeur ne peut donc JAMAIS décider unilatéralement de réduire ces délais règlementaires.
Le CSE possède toujours un délai d’étude d’un mois minimum avant de rendre son avis.
N’oubliez pas que le CSE doit nécessairement être informé (via la remise d’informations écrites ou dématérialisées sur la BDES) préalablement à sa consultation lors de laquelle il rendra un avis.
Pourquoi un tel délai? si le législateur vous met à disposition ce délai d’étude des documents afférents au projet de l’employeur, c’est pour que vous puissiez concilier le temps que vous y consacrerez avec l’exécution de votre contrat de travail.
Ainsi, vous serez obligatoirement informés en vue d’être consultés en tant que délégation du personnel préalablement à tout projet mis en oeuvre par l’employeur dans l’entreprise et plus généralement sur les questions relatives à la gestion, l’organisation et la marche générale de l’entreprise (article L.2312-8 du code du travail). Il en ira de même eu égard aux trois grandes réunions récurrentes que sont (article L.2312-17 du code du travail):
1- Les orientations stratégiques de l’entreprise,
2- La situation économique et financière de l’entreprise,
3- La politique sociale de cette dernière.
(Cass. soc., 8 juillet 2020, nº 19-10.987)
par L'ATELIER JURIDIQUE | 7 Juil, 2020 | Actualités
Voilà une question pertinente qui prend tout son sens suite à la violente pandémie de la Covid-19, alors que de nombreux salariés ont été exposés soit à une grande anxiété, soit à la perte d’un proche, à la crainte de perdre leur emploi ou parfois même la perte concrète de ce dernier de manière injustifiée.
D’autres ont du faire face à des violences conjugales, des cas de maltraitance ou bien vivent en ce moment un difficile divorce, conséquences d’un confinement plus que complexe.
Alors que peut faire le CSE d’une entreprise face à ces problèmes humains, personnels et délicats ?
1/ Rappelons-nous de ce qu’est une activité sociale et culturelle (ASC) :
Il n’existe pas de définition légale de la notion d’activité sociale et culturelle.
C’est pourquoi la jurisprudence a établi des critères cumulatifs permettant de caractériser cette notion. Ainsi, l’activité sociale et culturelle :
- Ne doit pas être obligatoire pour l’employeur ;
- Ne doit pas être la contrepartie du travail ;
- Doit avoir pour objet l’amélioration des conditions de vie et de travail des salariés.
2/ Puis, n’oubliez pas que le CSE est seul gestionnaire de ces ASC
Le code du travail vous rappelle que « Le CSE assure, contrôle ou participe à la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l’entreprise prioritairement au bénéfice des salariés, de leur famille et des stagiaires ».
(Article L. 2312-78 du Code du travail)
Vous comprenez ainsi que vous possédez un monopole de gestion de ces dernières, vous pouvez donc en créer ou en modifier à votre guise, dès lors que cette décision relève d’un vote à la majorité des élus titulaires.
Cette prérogative implique plusieurs choses :
- Si votre direction tentait de porter atteinte à votre monopole de gestion, cela pourrait constituer un délit d’entrave à votre fonctionnement. Le Président ne participe donc jamais au vote sur la mise en place d’une ASC.
(Cour de cassation, chambre criminelle, 2 novembre 1977, n°76-93162)
- Vous êtes en droit de créer ou supprimer une activité ;
- Vous pouvez modifier la répartition des fonds entre les activités ;
- Il vous est possible d’établir une participation différente entre salariés basée sur des critères non discriminatoires.
3/ Enfin, décidez comment les mettre en œuvre pour répondre aux besoins des salariés.
C’est maintenant que votre rôle de « gestionnaire » de « contrôleur » des œuvres sociales prend tout son sens. Vous devez apprendre à adapter vos offres en fonction des besoins réels et évolutifs des salariés que vous représentez. Il n’y a pas que les subventions « pures » comme des chèques cadeaux qui peuvent améliorer les conditions de vie et de travail des salariés, mais aussi :
- Une cellule d’écoute psychologique assurée par des professionnels de la santé au travail : Pour des salariés ayant subi une forte pression psychologique ou un isolement ayant eu des répercussions durant le confinement vous pourrez proposer cette assistance en ayant recours à une plateforme téléphonique permettant aux salariés de joindre un psychologue dédié à cela régulièrement.
- Une permanence téléphonique avec des avocats spécialisés en droit de la famille, droit de l’immobilier, droit pénal : les cas de divorce, de garde d’enfants, de violence conjugale se sont multipliés durant et post confinement. Proposer une aide juridique sur des aspects pluridisciplinaires du droit peut s’avérer d’une grande aide pour améliorer les conditions de vie des salariés. (Cass. soc., 21 juillet 1986, n°85-13424)
- Un accès à votre cabinet juridique spécialisé en droit du travail : normalement dédié aux seuls élus du CSE, nous sommes nous-mêmes très sollicités par les salariés des CSE que nous accompagnons quotidiennement. Nous avons en effet décidé d’ouvrir nos services de conseil en droit du travail aux salariés visés par les licenciements économiques, les ruptures conventionnelles, les ruptures abusives de période d’essai ou de contrat. Ces derniers se retrouvant souvent seuls et sans ressources pour un tel accompagnement.
- Il vous est aussi possible de proposer de manière exceptionnelle, une aide financière, « un secours » à certains salariés dans le besoin. La seule condition étant que chaque salarié dans la même situation puisse y avoir droit. Ainsi, pour pouvoir octroyer un secours exceptionnel à un salarié, cette aide devra :
– Répondre à une « situation individuelle particulièrement digne d’intérêt ».
– Être exceptionnelle.
– Être indépendante du statut professionnel du bénéficiaire.
– Être d’un montant justifié par la situation exceptionnelle du bénéficiaire et individualisé (approprié à la situation personnelle du salarié bénéficiaire).
(Cass. soc., 11 avr. 2002, n° 00-13.023)
Cette liste d’exemples n’est évidemment pas exhaustive, mais vous permets de constater que bien d’autres « oeuvres sociales » collectives existent afin d’aider au mieux les salariés qui n’en ont pas individuellement les moyens financiers.
Kate SOLIMAN
par L'ATELIER JURIDIQUE | 26 Mar, 2020 | Actualités
COVID-19
Dans cette période d’urgence sanitaire et face aux conditions de travail exceptionnelles auxquelles les salariés et entreprises doivent faire face, il est important pour nous que tous les collaborateurs de vos sociétés soient bien informés des mesures exceptionnelles et temporaires qui sont entrain d’être adoptées par le gouvernement.
Nous vous dressons ici, de manière succincte et vulgarisée, des fiches pratiques sur chaque thème, téléchargables en format PDF.
La ministre du travail a ainsi présenté, ce mercredi 25 mars 2020, 4 ordonnances qui auront des impacts (temporaires) sur vos conditions de travail et vos droits durant cette période d’urgence sanitaire.
Nous décryptons pour vous, de manière synthétique, chaque ordonnance précisant les mesures prises par le ministère du travail et leurs impacts (les fiches seront téléversées régulièrement):
⇒ Ordonnance portant mesures d’urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos
La fiche pratique: ORDONNANCE1 – COVID – CP RTT CET
L’Ordonnance: Ordonnance 1
⇒ Ordonnance portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421 2 du code du travail:
L’Ordonnance: Ordonnance 2 – Revenus de remplacement
⇒ Ordonnance adaptant temporairement les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation:
L’Ordonnance: Ordonnance 3 – IJSS:Intéressement:Participation
⇒ Décret sur l’activité partielle:
La fiche pratique: DECRET – COVID – FICHE ACTIVITE PARTIELLE
Le décret: Décret JO – Activité partielle – 26 mars 2020
⇒ Ordonnance N°2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière D’ACTIVITE PARTIELLE:
La fiche pratique:ORDONNANCE 4 – COVID – ACTIVITE PARTIELLE
L’Ordonnance: Ordonnance 4 – JO – Activité partielle
Mise à jour: Ce lundi 6 avril 2020, un simulateur est mis en ligne à disposition des salariés et employeurs par le ministère du travail vous permettant:
▪️Pour les salariés: d’estimer l’indemnité d’activité partielle que vous toucherez;
▪️Pour les employeurs: d’estimer les montants que vous devrez verser (avec estimation du reste à charge)
Le lien: http://www.simulateurap.emploi.gouv.fr
par L'ATELIER JURIDIQUE | 6 Mar, 2020 | Actualités
C’est la question qui terrifie les plateformes telles que UBER, BOLT, CHAUFFEUR PRIVE etc depuis plusieurs années déjà.
Voici le tout dernier éclairage des hauts magistrats à la Cour de cassation, mettant un terme aux débats.
(Cass. Soc., 4 mars 2020, n°19-13.316)
D’abord, il faut comprendre ce que signifie être « salarié ».
Juridiquement, être salarié, c’est être « subordonné » à quelqu’un (un employeur).
Ce lien de subordination liant un travailleur à un employeur se décomposer en trois éléments cumulatifs :
Une personne va exécuter un travail donné, tout en étant placée sous l’autorité d’un employeur qui aura :
- Le pouvoir de donner des instructions,
- Le pouvoir d’en contrôler l’exécution,
- Le pouvoir de sanctionner le non-respect des directives données.
Retenons également qu’il est de jurisprudence constante que constitue un indice de subordination le fait de travailler au sein d’un service organisé lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution de ce travail.
Ensuite, savoir ce qu’est un travailleur « indépendant ».
Pour y répondre, il faut se poser la question de ce qu’est un travailleur indépendant. Ici encore, trois éléments cumulatifs sont à vérifier :
- La possibilité de se constituer une clientèle propre,
- La liberté de fixer ses tarifs,
- La liberté de fixer les conditions d’exécution de la prestation de service.
Aujourd’hui, le schéma est tel qu’un chauffeur VTC est lié à une société utilisant une plate-forme numérique et une application afin de mettre en relation des clients et des chauffeurs qui exercent sous le statut de travailleur indépendant.
De l’indépendance au salariat, il n’y a qu’un pas.
Un « faux-contact » créant des étincelles entre les deux statuts: le VTC serait un salarié.
La réalité est toute autre selon les hauts magistrats, et démontre clairement un lien de subordination des chauffeurs VTC à ces plateformes notamment car :
- Le chauffeur intègre un service de prestation de transport dont l’activité est entièrement créée et organisée par cette société ne permettant pas au chauffeur de développer la moindre clientèle propre, ni de fixer ses tarifs ou encore les conditions d’exercice de sa prestation de transport.
- Le chauffeur est soumis à un itinéraire déterminé sur lequel il n’a aucun pouvoir de modification et pour lequel des modifications tarifaires sont automatiquement appliquées s’il ne le suit pas.
- La destination finale de la course n’est souvent pas connue préalablement par le chauffeur, cela induisant de fait l’impossibilité du chauffeur de choisir librement si la course lui convient ou non.
- La société détenant seule le contrôle de la plateforme, peut déconnecter de manière temporaire le chauffeur de l’application qu’elle gère dès lors que ce dernier refuse 3 courses, celui-ci pouvant perdre l’entier accès à son compte en cas de dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou de signalements de son comportement par les utilisateurs.
La somme de ces points conduit logiquement les magistrats à déduire qu’il existe incontestablement l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres au chauffeur VTC, des directives, mais aussi de contrôler l’exécution de sa prestation et a fortiori de le sanctionner en cas de manquements.
Le statut de travailleur indépendant du chauffeur est donc entièrement fictif.
La relation de travail ne dépend jamais de la volonté exprimée par les parties !
En effet, cette décision n’est pas la première allant en ce sens, la Cour de cassation avait déjà rendu une décision similaire, s’agissant des travailleurs des plateformes notamment dans l’affaire TAKE EAT EASY.
(Cass. Soc., 28 novembre 2018, n°17-20.079)
N’oublions pas que selon une jurisprudence établie, l’existence même d’une relation de travail salariée ne dépend aucunement de la volonté que les parties auraient exprimée. Elle ne dépend pas non plus de la dénomination qu’elles auraient données à leur contrat.
Fort heureusement, pour éviter tout abus et toutes sortes de pression, seules les conditions réelles dans lesquelles sont exercées l’activité professionnelle déterminent l’existence, ou non, d’un lien de subordination.
Les plateformes se devront de sécuriser rapidement les conventions les liant aux chauffeurs indépendants si elles veulent éviter de se confronter à une multitude de contentieux.
par L'ATELIER JURIDIQUE | 27 Fév, 2020 | Actualités
Voilà un mal touchant un bon nombre de CSE: le manque d’informations vous empêchant de fait de rendre un avis!
Et pour cause: comment rendre un avis éclairé, motivé et légitime au nom de ceux que vous avez choisi de représenter sans disposer d’informations claires et précises comme l’impose pourtant l’article L.2312-15 du code du travail?
Face à ce mal récurrent, la Cour de cassation est venue rappeler les droits des CSE en cas de manque d’informations sur la mise en oeuvre d’un projet de l’employeur nécessitant la consultation des élus.
(Cass. Soc., 26 février 2020, n°18-22.759)
Une information « en vue » d’une consultation
Rappelons le: lorsque l’employeur informe le CSE en vue de le consulter sur un projet qu’il compte mettre en oeuvre comme le prévoit l’article L.2312-8 du code du travail, il doit remettre aux élus des informations exhaustives sur ce projet.
L’information devant toujours être préalable à toute consultation, il est impossible, au risque pour l’employeur de se retrouver en entrave au bon fonctionnement de l’instance, de demander aux élus de rendre un avis sans les avoir informer au préalable de son projet dans le respect d’un délai légal.
Mais qu’en est-il lorsque le CSE se trouve dépourvu d’informations et donc dans l’impossibilité de rendre un avis réellement éclairé? C’est bien le problème qui se pose dans de nombreuses entreprise aujourd’hui.
La rétention d’informations par l’employeur permet au CSE de saisir le juge
La cour de cassation vient donc rappeler une solution pour un CE entièrement transposable au CSE en soulignant que le fait pour le CE de saisir le président du TGI avant l’expiration des délais dont il dispose pour rendre son avis motivé donne la possibilité au juge d’ordonner à l’employeur la production des éléments d’information manquants et de prolonger ou de fixer le délai de consultation, habituellement d’un mois comme prévu à l’article R.2312-6 du code du travail, ou de deux mois en cas de recours à un expert.
Attention cependant, les élus doivent se montrer réactifs et saisir le juge le plus tôt possible dans le cas ou ils estiment ne pas disposer d’éléments suffisants. Il a en effet déjà été relevé en 2015 qu’était irrecevable la demande d’un CE de prolonger le délai de consultation le jour même de l’expiration dudit délai.
(TGI Nanterre, ord. réf., 10 février 2015, n° 15/00195)
L’avantage de cette action est que le juge statuera en la forme des référés dans un délai de 8 jours.
Cette saisine n’étant toutefois pas suspensive du délai imparti au CSE
Gardez également à l’esprit qu’il ne sert à rien de saisir le juge dans l’espoir d’obtenir le gel du projet de l’employeur étant donner que cette saisine n’a absolument pas pour effet de prolonger le délai dont vous disposez pour rendre votre avis. Toutefois, et c’est bien l’objet du rappel de l’arrêt du 26 février dernier, si le juge estime que l’employeur a effectivement procéder à une rétention d’information, il peut décider de prolonger le délai de consultation, ce qui aura pour effet évident, le report de la mise en oeuvre du projet de l’employeur.
(Article L.2312-15 du code du travail)