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COVID-19: DECRYPTAGE DES ORDONNANCES PORTANT MESURES D’URGENCE

COVID-19: DECRYPTAGE DES ORDONNANCES PORTANT MESURES D’URGENCE

COVID-19
Dans cette période d’urgence sanitaire et face aux conditions de travail exceptionnelles auxquelles les salariés et entreprises doivent faire face, il est important pour nous que tous les collaborateurs de vos sociétés soient bien informés des mesures exceptionnelles et temporaires qui sont entrain d’être adoptées par le gouvernement.
Nous vous dressons ici, de manière succincte et vulgarisée, des fiches pratiques sur chaque thème, téléchargables en format PDF.
 
La ministre du travail a ainsi présenté, ce mercredi 25 mars 2020,  4 ordonnances qui auront des impacts (temporaires) sur vos conditions de travail et vos droits durant cette période d’urgence sanitaire.

Nous décryptons pour vous, de manière synthétique, chaque ordonnance précisant les mesures prises par le ministère du travail et leurs impacts (les fiches seront téléversées régulièrement):

 

  Ordonnance portant mesures d’urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos

La fiche pratique: ORDONNANCE1 – COVID – CP RTT CET
L’Ordonnance: Ordonnance 1

 Ordonnance portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421 2 du code du travail:

L’Ordonnance: Ordonnance 2 – Revenus de remplacement

 Ordonnance adaptant temporairement les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation:

L’Ordonnance: Ordonnance 3 – IJSS:Intéressement:Participation

 Décret sur l’activité partielle:

La fiche pratique: DECRET – COVID – FICHE ACTIVITE PARTIELLE

Le décret: Décret JO – Activité partielle – 26 mars 2020

 Ordonnance N°2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière D’ACTIVITE PARTIELLE:

La fiche pratique:ORDONNANCE 4 – COVID – ACTIVITE PARTIELLE

L’Ordonnance: Ordonnance 4 – JO – Activité partielle

Mise à jour: Ce lundi 6 avril 2020, un simulateur est mis en ligne à disposition des salariés et employeurs par le ministère du travail vous permettant:

▪️Pour les salariés: d’estimer l’indemnité d’activité partielle que vous toucherez;

▪️Pour les employeurs: d’estimer les montants que vous devrez verser (avec estimation du reste à charge)

Le lien: http://www.simulateurap.emploi.gouv.fr

Votre chauffeur Uber est-il un salarié ou demeure-t-il indépendant?

Votre chauffeur Uber est-il un salarié ou demeure-t-il indépendant?

C’est la question qui terrifie les plateformes telles que UBER, BOLT, CHAUFFEUR PRIVE etc depuis plusieurs années déjà.

Voici le tout dernier éclairage des hauts magistrats à la Cour de cassation, mettant un terme aux débats.

(Cass. Soc., 4 mars 2020, n°19-13.316)

 

D’abord, il faut comprendre ce que signifie être « salarié ».

Juridiquement, être salarié, c’est être « subordonné » à quelqu’un (un employeur).

Ce lien de subordination liant un travailleur à un employeur se décomposer en trois éléments cumulatifs :

Une personne va exécuter un travail donné, tout en étant placée sous l’autorité d’un employeur qui aura :

  • Le pouvoir de donner des instructions,
  • Le pouvoir d’en contrôler l’exécution,
  • Le pouvoir de sanctionner le non-respect des directives données.

Retenons également qu’il est de jurisprudence constante que constitue un indice de subordination le fait de travailler au sein d’un service organisé lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution de ce travail.

Ensuite, savoir ce qu’est un travailleur « indépendant »

Pour y répondre, il faut se poser la question de ce qu’est un travailleur indépendant. Ici encore, trois éléments cumulatifs sont à vérifier :

  • La possibilité de se constituer une clientèle propre,
  • La liberté de fixer ses tarifs,
  • La liberté de fixer les conditions d’exécution de la prestation de service.

Aujourd’hui, le schéma est tel qu’un chauffeur VTC est lié à une société utilisant une plate-forme numérique et une application afin de mettre en relation des clients et des chauffeurs qui exercent sous le statut de travailleur indépendant.

De l’indépendance au salariat, il n’y a qu’un pas.

Un « faux-contact » créant des étincelles entre les deux statuts: le VTC serait un salarié.

La réalité est toute autre selon les hauts magistrats, et démontre clairement un lien de subordination des chauffeurs VTC à ces plateformes notamment car :

  1. Le chauffeur intègre un service de prestation de transport dont l’activité est entièrement créée et organisée par cette société ne permettant pas au chauffeur de développer la moindre clientèle propre, ni de fixer ses tarifs ou encore les conditions d’exercice de sa prestation de transport.
  2. Le chauffeur est soumis à un itinéraire déterminé sur lequel il n’a aucun pouvoir de modification et pour lequel des modifications tarifaires sont automatiquement appliquées s’il ne le suit pas.
  3. La destination finale de la course n’est souvent pas connue préalablement par le chauffeur, cela induisant de fait l’impossibilité du chauffeur de choisir librement si la course lui convient ou non.
  4. La société détenant seule le contrôle de la plateforme, peut déconnecter de manière temporaire le chauffeur de l’application qu’elle gère dès lors que ce dernier refuse 3 courses, celui-ci pouvant perdre l’entier accès à son compte en cas de dépassement d’un taux d’annulation de commandes ou de signalements de son comportement par les utilisateurs.

La somme de ces points conduit logiquement les magistrats à déduire qu’il existe incontestablement l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres au chauffeur VTC, des directives, mais aussi de contrôler l’exécution de sa prestation et a fortiori de le sanctionner en cas de manquements.

Le statut de travailleur indépendant du chauffeur est donc entièrement fictif.

 

La relation de travail ne dépend jamais de la volonté exprimée par les parties !

En effet, cette décision n’est pas la première allant en ce sens, la Cour de cassation avait déjà rendu une décision similaire, s’agissant des travailleurs des plateformes notamment dans l’affaire TAKE EAT EASY.

(Cass. Soc., 28 novembre 2018, n°17-20.079)

N’oublions pas que selon une jurisprudence établie, l’existence même d’une relation de travail salariée ne dépend aucunement de la volonté que les parties auraient exprimée. Elle ne dépend pas non plus de la dénomination qu’elles auraient données à leur contrat.

Fort heureusement, pour éviter tout abus et toutes sortes de pression, seules les conditions réelles dans lesquelles sont exercées l’activité professionnelle déterminent l’existence, ou non, d’un lien de subordination.

Les plateformes se devront de sécuriser rapidement les conventions les liant aux chauffeurs indépendants si elles veulent éviter de se confronter à une multitude de contentieux.

EN CAS D’INFORMATIONS INSUFFISANTES, LE CSE PEUT OBTENIR LA PROLONGATION DE SON DELAI DE CONSULTATION!

EN CAS D’INFORMATIONS INSUFFISANTES, LE CSE PEUT OBTENIR LA PROLONGATION DE SON DELAI DE CONSULTATION!

Voilà un mal touchant un bon nombre de CSE: le manque d’informations vous empêchant de fait de rendre un avis! 
Et pour cause: comment rendre un avis éclairé, motivé et légitime au nom de ceux que vous avez choisi de représenter sans disposer d’informations claires et précises comme l’impose pourtant l’article L.2312-15 du code du travail?
Face à ce mal récurrent, la Cour de cassation est venue rappeler les droits des CSE en cas de manque d’informations sur la mise en oeuvre d’un projet de l’employeur nécessitant la consultation des élus.

(Cass. Soc., 26 février 2020, n°18-22.759)

Une information « en vue » d’une consultation

Rappelons le: lorsque l’employeur informe le CSE en vue de le consulter sur un projet qu’il compte mettre en oeuvre comme le prévoit l’article L.2312-8 du code du travail, il doit remettre aux élus des informations exhaustives sur ce projet.
L’information devant toujours être préalable à toute consultation, il est impossible, au risque pour l’employeur de se retrouver en entrave au bon fonctionnement de l’instance, de demander aux élus de rendre un avis sans les avoir informer au préalable de son projet dans le respect d’un délai légal.
Mais qu’en est-il lorsque le CSE se trouve dépourvu d’informations et donc dans l’impossibilité de rendre un avis réellement éclairé? C’est bien le problème qui se pose dans de nombreuses entreprise aujourd’hui.

La rétention d’informations par l’employeur permet au CSE de saisir le juge

La cour de cassation vient donc rappeler une solution pour un CE entièrement transposable au CSE en soulignant que le fait pour le CE de saisir le président du TGI avant l’expiration des délais dont il dispose pour rendre son avis motivé donne la possibilité au juge d’ordonner à l’employeur la production des éléments d’information manquants et de prolonger ou de fixer le délai de consultation, habituellement d’un mois comme prévu à l’article R.2312-6 du code du travail, ou de deux mois en cas de recours à un expert.
Attention cependant, les élus doivent se montrer réactifs et saisir le juge le plus tôt possible dans le cas ou ils estiment ne pas disposer d’éléments suffisants. Il a en effet déjà été relevé en 2015 qu’était irrecevable la demande d’un CE de prolonger le délai de consultation le jour même de l’expiration dudit délai.
(TGI Nanterre, ord. réf., 10 février 2015, n° 15/00195)
L’avantage de cette action est que le juge statuera en la forme des référés dans un délai de 8 jours.

Cette saisine n’étant toutefois pas suspensive du délai imparti au CSE

Gardez également à l’esprit qu’il ne sert à rien de saisir le juge dans l’espoir d’obtenir le gel du projet de l’employeur étant donner que cette saisine n’a absolument pas pour effet de prolonger le délai dont vous disposez pour rendre votre avis. Toutefois, et c’est bien l’objet du rappel de l’arrêt du 26 février dernier, si le juge estime que l’employeur a effectivement procéder à une rétention d’information, il peut décider de prolonger le délai de consultation, ce qui aura pour effet évident, le report de la mise en oeuvre du projet de l’employeur.
(Article L.2312-15 du code du travail)
PSE : si l’employeur peut pondérer les critères d’ordre de licenciement, le fait d’en soustraire un totalement est prohibé.

PSE : si l’employeur peut pondérer les critères d’ordre de licenciement, le fait d’en soustraire un totalement est prohibé.

La prise en compte de tous les critères d’ordre de licenciement légaux est une condition substantielle à l’homologation d’un PSE par la DIRECCTE.

(CE, 27 janvier 2020, n°426230, Sté GM et S.Industry France)

Des critères légaux pondérables par l’employeur.

Selon les termes du code du travail et notamment ceux de l’article L.1233-5, un employeur procédant à un licenciement collectif pour motif économique, non tenu par un accord collectif applicable, doit définir scrupuleusement les critères retenus afin de fixer l’ordre des départs des salariés concernés par ce licenciement, et ce après avoir consulté le CSE.

L’on parle ici de critères bien connus, à savoir :

  • Les charges de famille (notamment les parents isolés) ;
  • L’ancienneté de service du salarié (dans l’établissement ou l’entreprise) ;
  • La situation des salariés présentant des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle complexe (situation de handicap ou personnes âgées) ;
  • Les qualités professionnelles (par catégorie professionnelle).

Lorsque l’on dit qu’il est possible pour l’employeur de procéder à une « pondération » de ces critères, cela signifie qu’il peut choisir d’en privilégier certains par rapport à d’autres, à la condition de toujours tenir compte de l’ensemble de ce derniers. Ainsi, il ne peut donc pas en favoriser certains et en supprimer d’autres.

Une délicate barémisation excluant un critère d’ordre de départ.

Dans le cas d’espèce, l’employeur, dans l’élaboration de son document unilatéral, avait bien fixé un barème pondérant des critères d’ordre de départ, avec une subtilité que le Conseil d’Etat n’a pas laissé passer :

  • Le critère de l’ancienneté était pondéré sur 2 points pour une ancienneté de moins de 5 ans, et sur 5 points si supérieure à 21 ans dans l’entreprise ;
  • Les situations rendant la réinsertion professionnelle difficile, l’âge et les charges familiales faisaient également l’objet de trois barèmes distincts ;
  • Le critère des qualités professionnelles quant à lui (souvent objet de discordes) faisait l’objet d’une pondération basée sur l’ancienneté du salarié : l’expérience dans l’entreprise étant corrélée aux qualités professionnelles selon le document unilatéral.

Les requérants estimaient ici que le critère afférent à l’ancienneté avait été appliqué à 2 reprises, l’une se confondant avec le critère des qualités professionnelles.

Le critère subjectif afférent aux qualités professionnelles ne peut pas se déduire de la seule ancienneté.

C’est bien là que le bât blesse : le critère ô combien subjectif que constitue celui des qualités professionnelles ne peut pas uniquement être corrélé à l’ancienneté d’un salarié. Il serait bien simple aujourd’hui de faire rimer longue ancienneté avec l’aspect qualitatif d’une prestation professionnelle.

Le document unilatéral ne pouvait donc pas être valablement homologué par l’autorité administrative sauf à relever une situation d’une telle particularité qu’elle aurait empêché la mise en œuvre dudit critère, ce qui n’était, en l’espèce, pas le cas.

Kate SOLIMAN

La BDES : Que doit-elle contenir après une fusion d’entreprises ?

La BDES : Que doit-elle contenir après une fusion d’entreprises ?

BDES: Quelles informations obligatoires après une fusion de plusieurs entreprises?

 

Cheval de bataille de nombreux CSE (anciennement CE), le contenu de la base de données économiques et sociales (BDES) et plus exactement son défaut de mise à jour par l’employeur commence à donner lieu à sanctions.

Le cas soulevé par la Cour de cassation dans cet arrêt du 27 novembre 2019 (Cass. Soc. 27 novembre 2019, n°18-22.532) est très particulier. Il s’agissait de savoir quelles données devaient être transmises aux élus du Comité central d’entreprise (CCE) et leur expert après une fusion de plusieurs sociétés.

La Cour juge ici qu’en cas de fusion, les informations à transmettre aux élus, s’agissant des 2 années précédentes, doivent porter sur toutes les entités fusionnées.

 

Bref rappel des faits :

 

Une société a fait l’objet d’une fusion de deux autres entités. Dans le cadre de la réunion récurrente sur la politique sociale de l’entreprise, cette dernière consulte son CCE.

Les élus décident de recourir à un expert comme la loi leur permet. Ensemble, ils saisissent le tribunal de grande instance en la forme des référés pour obtenir deux choses :

  • La communication des documents manquants portant sur la situation sociale des entités fusionnées sur les deux années précédant la fusion ;
  • Le report des délais de consultation du CCE.

Une solution logique mais créatrice de droits

 

La Cour de cassation estime qu’en application des textes du Code du travail (anciens articles L.2323-8 et R.2323-1-5), les informations figurant à la BDES dans le cadre de cette consultation portent sur : les 2 années précédentes, les perspectives sur les 3 années suivantes.

Ainsi, en cas de fusion de plusieurs sociétés, les informations transmises portent sur toutes les entités parties à la fusion pour les années en cause. Le seul moyen pour l’employeur de se dédouaner de cette obligation est d’apporter la preuve qu’il n’a pas la possibilité de se procurer de telles informations.

Nous savons déjà, et ce depuis la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, que le délai entre l’information et la consultation de l’instance ne court qu’à compter de la communication de toutes les informations aux élus. Les hauts magistrats l’ont d’ailleurs souligné très récemment eu égard à la consultation sur les orientations stratégiques (Cass. Soc. 28 mars 2018, n°17-13.081).

L’innovation de cet arrêt du 27 novembre 2019 porte sur le contenu de la BDES dans une entreprise étant le fruit d’une fusion : il est désormais établi que ces informations devront porter sur toutes les sociétés fusionnées, et ce sur les 2 années précédentes.

Attention toutefois aux BDES conventionnelles

 

Depuis les ordonnances Macron du 22 septembre 2017, il est désormais possible de conclure un accord d’entreprise prévoyant l’architecture, le contenu et l’organisation de cette base. (Articles L.2312-21 et R. 2312-11 du code du travail).

Prenez donc garde à ne pas conclure d’accord prévoyant, en cas de fusion ou d’absorption, une mise à disposition des seules informations concernant une seule entité, au risque de perdre la possibilité d’accès à des éléments vous permettant de rendre un avis éclairé.