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CORONAVIRUS : Pouvez-vous légitimement exercer votre « droit de retrait » et quitter votre poste de travail ?

CORONAVIRUS : Pouvez-vous légitimement exercer votre « droit de retrait » et quitter votre poste de travail ?

Psychose ou crainte légitime, l’évolution du Coronavirus ou Covid-19 inquiète plus que jamais les salariés des entreprises.

Vous redoutez sans doute les risques de contaminations liés aux contacts avec des personnes pouvant être contaminées dans le cadre de l’exercice de votre travail, sachez exercer conformément votre droit de retrait.

L’obligation de sécurité de l’employeur

Elle est bien connue et pourtant encore souvent mise à mal, l’obligation de sécurité des travailleurs incombe à votre employeur comme en dispose l’article L.4121-1du code du travail. Ce dernier se doit de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer votre sécurité et protéger votre santé physique et mentale.

Cette obligation est enrichie de l’article L.4132-5 du même code, prévoyant que votre employeur doit prendre les mesures et donner les instructions nécessaires pour vous permettre en cas de danger grave et imminent, d’arrêter votre activité et de vous mettre en sécurité en quittant immédiatement votre lieu de travail.

Mais attention aux procédures.

L’exercice du droit de retrait en entreprise

L’article L.4131-1 du code du travail vous permet dans un cadre précis d’exercer ce droit. En effet, il vous est possible d’alerter immédiatement votre employeur d’une situation de travail dont vous avez un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger « grave » et « imminent » pour votre vie ou votre santé, ou si vous constater la moindre défectuosité dans les systèmes de protection devant être mis en place dans votre entreprise.

Attention cependant à bien interpréter les caractères « grave » et « imminent » du danger, cela portant bien trop souvent à interprétation erronnée.

Le danger « grave » correspond à « tout danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée ».

Le danger « imminent » est celui « susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché ».

Ce n’est qu’une fois cette information faite à votre employeur et après vous être assuré de la légitimité de l’exercice de ce droit que vous pourrez vous retirer.

Une procédure stricte qui n’est pas sans risque

Bien souvent en entreprise, des salariés se sentent légitimes à mettre en œuvre ce droit de retrait car ils s’estiment « exposés » à un risque.

Mais attention, vous devez :

  • D’une part vous assurer que le danger est d’une gravité telle qu’il pourrait entrainer de manière brutale votre décès ou une incapacité permanente ou temporaire prolongée,
  • D’autre part que votre employeur n’a pas mis en œuvre des mesures de protection pour remédier à ce danger.

Il a d’ailleurs déjà été reconnu très récemment qu’un salarié quittant prématurément son poste de travail sans en avertir son employeur et sans remplir exactement les conditions susmentionnées était en situation d’abandon de poste.

(CA de Metz, Chambre sociale, 24 Février 2020 – n° 17/03315)

Un usage légitime du droit de retrait assurant votre protection…

Si vous exercez conformément votre droit de retrait, votre employeur sera dans l’impossibilité de vous imposer la reprise de votre activité si le danger grave et imminent invoqué persiste.

De surcroit, comme en dispose l’article L.4131-3 du code du travail, votre employeur ne pourra vous pénaliser d’aucune sanction ni retenue sur salaire dès lors que vous aviez un motif raisonnable de penser qu’il présentait un danger grave et imminent pour votre vie ou votre santé.

…Mais pouvant entrainer des sanctions si exercer abusivement

Toutefois attention, si les conditions décrites ci-dessus ne sont pas réunies, votre employeur pourra, face à votre abandon de poste, procéder à une retenue sur salaire quand bien même vous demeureriez à sa disposition.

(Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 Novembre 2008 – n° 07-87.650)

Il a également récemment été jugé que le licenciement d’un salarié refusant avec persistance de reprendre son travail alors que son droit de retrait n’était plus justifié, était légitime.

(CA, Besançon, Chambre sociale, 7 Mai 2019 – n° 18/00313)

 

Ce droit de retrait peut-il être mis en oeuvre lorsque l’un de vos collègues revient d’une zone à risque ou a été en contact avec une personne contaminée ?

Le ministère du travail précise que les conditions d’exercice du droit de retrait ne sont pas réunies, sous réserve de l’appréciation souveraine des juges, si votre employeur a mis en œuvre les recommandations gouvernementales qui sont chaque jour actualisées sur cette page: https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus

En effet, ces recommandations suivies, le risque pour les salariés de l’entreprise serait limité car seul un contact prolongé et rapproché avec des personnes infectées pourrait être facteur de contamination.

Kate SOLIMAN

Puis-je être sanctionné en cas de retards ou absences dus aux grèves ?

Puis-je être sanctionné en cas de retards ou absences dus aux grèves ?

Oui !

Depuis le 5 décembre 2019, la France fait face à un mouvement social très important. Ainsi, beaucoup de salariés rencontrent des difficultés pour venir travailler en raison, notamment, des grèves de transports en commun.

Lorsque des retards ou des absences se multiplient mais que le salarié n’y est pour rien, peut-il se le voir reprocher et risquer une sanction, voir pire, un licenciement?

Tout dépend de la situation et des éléments présentés!

 

La faute peut-être caractérisée…

Un licenciement pour faute a été validé s’agissant d’un salarié ayant refusé de rejoindre son lieu de travail en raison d’une grève des transports d’une durée de 18 jours. Ce dernier n’avait pas tenté de s’organiser pour venir jusqu’à son entreprise pendant toute la durée de la grève. Précisons que l’entreprise était en surcroît d’activité(Cour d’Appel de Bordeaux, 28 décembre 1999, n°97-5767).

Même tarif pour un salarié à l’origine d’absences répétées dues à une grève des transports. Les juges ont ici soulevé que les autres salariés de l’entreprise avaient trouvé des solutions pour rejoindre l’entreprise. (Cour d’Appel de Paris, 26 mai 2005, n°04-36767).

… Ou bien écartée.

A contrario, a été jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement d’un salarié qui était parti de son travail avant l’heure normale en raison d’une grève des transports. En l’espèce, aucune faute ne lui avait été reprochée et en 5 ans, il n’avait jamais fait l’objet d’une seule remontrance. (C.Cass. Soc. 10 février 1993, n°91-40.746).

En résumé, la grève dans les transports en commun ne peut pas être considérée comme une justification valable pour des retards ou absences au travail. L’employeur doit également assurer la continuité de son service. Il doit donc être prévenu relativement à l’avance pour pallier une absence d’un salarié. Il peut également vous autoriser de manière exceptionnelle d’avoir recours au télétravail, au « Home office », ou encore à prendre un congé payé ou un RTT par exemple.

La bonne foi et l’absence d’abus.

Bien évidemment, en cas de conflit sur la réalité d’une faute, le juge appréciera au cas par cas chaque situation. Le salarié ne pouvait-il faire autrement que d’être en retard? ou de ne pas venir au travail? Il évaluera la situation en fonction des éléments mis à sa disposition. La bonne foi et l’absence d’abus du salarié seront évidemment pris en compte.

En effet, gardons à l’esprit que le salarié doit s’organiser dans ses déplacements entre son domicile et son lieu de travail. Il doit en effet s’assurer d’arriver, autant que faire se peut, à l’heure à son poste. (Cour d’Appel de Paris, 18 mars 2015, n°12-10812).

La grève n’étant pas un cas de force majeur, bien qu’handicapante, les salariés informés d’un tel mouvement annoncé et prévu doivent mettre tous les moyens possibles en œuvre pour s’organiser. En effet, s’adapter au regard du service minimum en vigueur dans les transports publics, ou bien prendre une journée de congés payés sont des solutions. A tout le moins, pensez à informer votre employeur de toutes difficultés, retards et absences à prévoir. (Cour d’Appel de Versailles, 30 avril 2014, n°13-03038)